Traité des Passions


© Crédit photographique : Thomas Maisonnasse

Tondo
Encre de Chine sur bois
105 cm
2006

    « C’est donc une chose bien certaine, que le corps s’altère et se change quand l’âme s’émeut, et que celle-ci ne fait presque point d’action qu’elle ne lui en imprime les marques. » Charles Le Brun « L’expression des passions », 1668. C’est au nom de la science et dans une visée édifiante que Le Brun entreprit non seulement de recenser l’expression des passions, mais aussi et surtout de les systématiser dans une combinatoire sémiologique. Il établit, à la suite des philosophes, des médecins, des moralistes, six passions fondamentales ; et, chose remarquable, il ne se trouve pas, dans ce système, de passion zéro ; l’impassibilité y est une passion composée. Dans un article paru dans la Nouvelle Revue de Psychanalyse, Hubert Damisch soutient la thèse selon laquelle ces physionomies sont des masques (personae). Il est vrai qu’elles ne peuvent en aucun cas être tenues pour des portraits. Cependant cette thèse est contredite par la présupposition d’une continuité organique entre les affections de l’âme et les expressions physionomiques des passions qui ne ménage aucun écart, aucun jeu où pourrait se glisser la moindre possibilité de dissimulation, de feinte, d’hypocrisie ou de mensonge que suppose le masque. Ces sujets sont au contraire sans arrière-pensées : assujettis au règne d’une transparence absolue, tyrannique. De même que dans ses physiognomonies Lebrun rivait ses visages dans une ressemblance animale qui devait traduire sans ambages leur caractère.